316. a) La fonction g est définie par g(0) = 0 et x ∈ R*,g(x) = exp(-x-2). Montrer que g est de classe C sur R mais n’est pas développable en série entière en 0.

b) Soit f : R R de classe C. Montrer que f est développable en série entière en 0 si et seulement s’il existe a > 0, M > 0 et A > 0 tels que n ∈ N,x ∈ [-a,a],|f(n)(x)|MAnn!.

c) Établir l’existence de A > 0 tel que n ∈ N,x ∈ R,|g(n)(x)|(n!)32An.

a) On définit une suite (Qn)n∈N de polynômes par récurrence en posant Q0 = 1 et Qn+1 = -X2 Qn ʹ + 2X3Qn pour tout n ∈ N. À partir de la formule de dérivation d’un produit et d’une composée, une récurrence facile montre que, pour tout n ∈ N, la restriction h de g à R* est n fois dérivable et de dérivée n-ième x↦→Qn(x-1)e-x-2 . Par croissances comparées (x-1 )k e-x-2 tend vers 0 quand x tend vers 0, pour tout k ∈ N, donc par combinaison linéaire h(n) a pour limite 0 en 0 pour tout n ∈ N. Ainsi, h admet un unique prolongement ^h: R R de classe C. En particulier ^h(0) = lim0h = 0, donc ^h = g, et le résultat voulu est démontré. En outre, pour tout n ∈ N, g(n)(0) = lim0h(n) = 0. Si g était, sur un intervalle de la forme ]- r,r[ avec r > 0, la somme d’une série entière, cette série entière serait ∑g(n)(0)
n!zn, donc g serait nulle au voisinage de 0, ce qu’elle n’est évidemment pas.

Ainsi, g n’est pas développable en série entière en 0.

b) Supposons l’existence de trois réels a,M,A strictement positifs tels que

∀N ∈ N,∀x ∈ [- a,a],|f(N)(x)| ≤ M AN N!
Posons ρ := min (a,A-1). Soit x ∈]- ρ,ρ[. Soit N ∈ N. La fonction f(N+1) est donc bornée sur le segment d’extrémités 0 et x par Mρ-(N+1)(N + 1)!. L’inégalité de Taylor-Lagrange donne donc
||      N          ||
||f(x)- ∑  f(n)(0)xn||≤ |x|N+1M ρ-(N+1).
|      n=0  n!    |
Comme 0 |x|ρ-1 < 1, le terme majorant tend vers 0 quand N tend vers + , donc
      + ∞
f(x) = ∑  f(n)(0)xn.
      n=0   n!

Réciproquement, supposons qu’il existe une suite réelle (cn)n0 et un r ∈ R*+ tels que f(x) = +∞∑

n=0cnxn pour tout x ∈]- r,r[. Soit N ∈ N. Alors f(N)(x) = +∑∞

n=Ncn(nn-!N)!xn-N pour tout x ∈ ]-r,r[. Posons a := r
4. Soit x ∈ [-a,a]. Alors

(N)+∑∞                         +∑ ∞              +∑ ∞
|f(x)|≤  |cn |---n!----an-N ≤ a-N     |cn|2nan ≤ a- N  |cn|(2a)n,
N!n=N    N !(n - N)!           n=N              n=0
                                            ◟----◝M◜---◞
la convergence de la série de droite étant assurée par le fait que 0 2a < r. Ainsi,
                    (N )         -1 N
∀N ∈ N,∀x ∈ [- a,a],|f  (x)| ≤ M (a ) N !

c) Fixons d’abord x > 0 et montrons que la fonction φ : h↦→exp(-(x - h)-2) est la somme d’une série entière sur le disque ouvert D := Do(0,x). Soit en effet h ∈ D. Par produit de Cauchy, on trouve d’abord le développement

                      (+∑ ∞   )2  ∑+∞
∀z ∈ Do(0,1),(1 - z)-2 =     zn   =    (n + 1)zn.
                       n=0       n=0
Il vient donc
                    +∞                +∞
(x-h)-2=x-2(1 - hx-1)-2 = x-2 ∑ (n + 1)(hx-1)n = ∑ (n + 1)x -(n+2)hn.
                    n=0               n=0
puis
         (                    )
             +∑∞
φ(h) = exp -    (n + 1)x-(n+2)hn  .
             n=0
Notons que (n + 1)x-(n+2) 0 pour tout n ∈ N. Par produit de Cauchy de séries entières, il existe, pour tout N ∈ N , une suite réelle positive (an,N)n∈N telle que
       (+∑∞               )N    +∑∞
∀h ∈ D,    (n+ 1)x-(n+2)hn    =    an,N hn.
        n=0                    n=0
Par développement de l’exponentielle, on en déduit
     +∑ ∞ (- 1)N +∑∞         +∑∞ +∑∞  (- 1)N an,N
φ(h) =    -N-!--   an,N hn =        ---N-!---hn.
     N=0       n=0         N=0n=0
De même,
                 + ∞ +∞
exp ((x - |h|)-2) = ∑  ∑  an,N|h|n,
                 N=0 n=0 N !
ce qui montre, puisque anN,N!- 0, la sommabilité de la famille (   N    n
(--1)-aNn!,Nh--)(N,n)∈N2. On déduit donc du théorème de Fubini que si h0 alors
      +∑∞  +∑∞ (- 1)N a      +∑ ∞
φ(h) =       -------n,N-hn =    bnhn
      n=0N=0     N!        n=0
bn := +∞∑

N=0N
(-1)anN!,N- pour tout n ∈ N (l’existence de bn étant garantie par le fait que hn0). En particulier, comme D contient un élément non nul tous les bn sont bien définis, et le théorème de Fubini donne encore φ(h) = +∑∞

n=0bnhn même si h = 0.

Ensuite, le théorème de dérivation d’une série entière indique que bn = (-1)ng(n)(x)
  n! pour tout n ∈ N .

Fixons maintenant n ∈ N* et exprimons différemment bn. Soit r ∈]0,x[. Alors,

                   +∞
∀θ ∈ R,φ(reiθ)e-inθ = ∑ b rkei(k-n)θ.
                       k
                   k=0
Ici, la convergence de la série est normale sur R par rapport à la variable θ car |bkrkei(k-n)θ| = |bk|rk pour tout θ ∈ R , et la série ∑bkrk converge absolument car le rayon de convergence de ∑bkzk est strictement supérieur à r. Ainsi, par intégration terme à terme sur un segment (avec terme général continu), on obtient
∫π                +∑∞ ∫ π
   φ(reiθ)e-inθdθ =        bkrkei(k-n)θdθ = 2πbnrn
 -π               k=0 -π
car ∫π

-πeikθ d θ = [(ik)-1eikθ]π-π = 0 pour tout k ∈ Z*. Ainsi,
    r- n∫ π            iθ -2  -inθ
bn =-2π-    exp(- (x- re )  )e   dθ,
         -π
donc par inégalité triangulaire
           ∫
      --1--  π   (    (      iθ- 2))
|bn| ≤ 2πrn -πexp - Re (x - re  )    dθ.
Dans la suite, prenons r := x
3. Pour tout réel θ, on a donc
( )   Re((x - reiθ)2)    9 - 6 cosθ+ cos(2θ)   2r2     1
Re(x-reiθ)-2 =  -------iθ4---≥ r2-----------4----- ≥ ----4 =----2⋅
        |x - re |            (x+ r)         256r   128r
Ainsi, en posant C = 1--
128, on obtient
  (n)        -n - C-       (         C )
|g  (x)| ≤ n!r  e  r2 = n!exp  - nln r- r2 .
Posons alors ψ : t ∈ R *+↦→-nlnt-tC2, fonction dérivable de dérivée ψʹ : t↦→-nt + 2Ct3 =      2
2C-tn3t-On en déduit facilement que ψ admet un maximum en •---
  2C-
  n, de valeur n-lnn
  2 -n
2 ln(2C) -n
2. En posant B := (2C)-12, on en déduit que
                           √ ------
∀x > 0,∀n ∈ N*,|g(n)(x)| ≤ Bnn! nne-n.
Enfin, la formule de Stirling montre que la suite de terme général nne-n-
 n! tend vers 0, et elle est donc bornée par un réel D 1. Par suite, nne-n n!D n!Dn pour tout n 1. Ainsi, en posant A := BD12 , on en déduit
      *       *   (n)       n   3⁄2
∀x ∈ R+,∀n ∈ N ,|g  (x )| ≤ A (n!)  .
Fixons n ∈ N * . Comme g est paire on trouve x ∈ R,g(n)(x) = (-1)ng(n)(-x). En outre g(n) (0) = 0 comme vu en a) . Ainsi
        (n)      n    3⁄2
∀x ∈ R, |g (x)| ≤ A (n!) .
Enfin on a trivialement
∀x ∈ R,|g(0)(x)| ≤ 1 = A0(0!)3⁄2.


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