313. On note E l’espace vectoriel C0([0,1], R). Une suite (gn)n∈N ∈ EN est appelée base de type S lorsque, pour tout f ∈ E, il existe une unique suite (cn)n∈N ∈ RN telle que f = +∞∑

n=0cngn avec convergence uniforme.

a) Montrer qu’il existe une suite (xn)n∈N d’éléments deux à deux distincts de [0,1] telle que x0 = 0, x1 = 1, et {xnn ∈ N} soit dense dans [0,1].

b) Soit (gn )n∈N une base de type S. Montrer que (∥ggnn∥)n∈N est une base de type S.

c) Soit f ∈ E. Pour tout n ∈ N*, on note Fn la fonction de [0,1] dans R qui est continue, affine sur chaque intervalle ouvert inclus dans [0,1] \{x0,,xn}, et coïncide avec f en x0,,xn. Montrer que (Fn)n1 converge uniformément vers f sur [0,1].

d) En déduire l’existence d’une base de type S.

a) On pose x0 = 0, x1 = 1 et on introduit une indexation dénombrable (xn)n2 des rationnels de ]0, 1[.

b) Notons que les gn sont non nuls, en raison de l’unicité de la décomposition. Posons hn := gn--
∥gn∥. Alors tout élément f ∈ E s’écrit f = +∑∞

n=0cngnhn, avec convergence uniforme, et il y a évidemment unicité de l’écriture.

c) On a Fn (xk ) = f(xk) pour k n. De plus, Fn est continue. Tout revient à montrer, par différence, que si gn := f - Fn, alors (gn) converge uniformément vers 0.

Soit ϵ > 0 et η > 0 relatif à l’uniforme continuité de f sur [0,1]. On peut trouver, par densité, des éléments x0 < xn2 < ⋅⋅⋅ < xnp < x1 formant une subdivision de pas moindre que η. On pose n0 := 0 et n1 := 1. Soit N := max(nk), et n N. Soit x ∈ [0,1]. Il existe k p - 1 tel que x ∈ [xnk , xnk+1 ]. On a alors

|gn(x)|=|gn(x)- gn(xnk)| ≤ |f(x)- f(xnk)|+ |Fn (x )- F(xnk)| ≤ ϵ+|Fn(x)- F (xnk)|.

Comme Fn est affine sur [xnk,xnk+1],

|Fn(x)-F (xnk)| ≤ |Fn(xnk+1)- Fn(xnk)| = |f(xnk+1)- f(xnk)| ≤ ϵ.

Par suite, pour n N, et pour tout x ∈ [0,1], |gn(x)|2ϵ.

d) Notons, pour n 1, fn la fonction affine par morceaux qui vaut 1 en xn et 0 en x0,,xn-1 : elle est donc nulle sur tout intervalle de la subdivision formée par x0,,xn sauf sur les deux (pour n 2) intervalles dont xn est une extrémité. On note f0 la fonction affine égale à 1 en 0 et 0 en 1.

Considérons la fonction Gn(f) = Fn(f) -∑n
  j=0λj,nfj et déterminons les λk,n de façon que Gn (f) s’annule en x0,,xn. Ceci équivaut à f(x0) = λ0,n et

                         ∑k
∀k ∈ {1,...,n} 0 = f(xk)-    λj,nfj(xk),
                         j=0
soit encore
             k-∑ 1
λk,n = f(xk)-    λj,nfj(xk).
             j=0
Comme λ0,n ne dépend pas de n, on voit par récurrence que la condition précédente détermine λk,n de façon unique, et que λk,n ne dépend pas de n. On pose λk := λk,n. La fonction Fn (f) - ∑nj=0λjfj s’annule donc en x0,,xn. Elle est affine sur chacun des intervalles de la subdivision associée. Elle est donc nulle. Ainsi,
        n
F (f) = ∑ λ f .
 n     j=0 j j
Par suite, f = ∑+∞
j=0λjfj, la convergence étant uniforme sur [0,1].

Enfin, supposons que les μj soient tels que ∑+ ∞
 j=0μjfj = 0, la convergence étant uniforme. En évaluant en x0 , on obtient : μ0 = 0. Si l’on suppose par récurrence que μ0 = ⋅⋅⋅ = μk-1 = 0, alors l’égalité μk = 0 découle de l’évaluation en xk.

Une famille de type S se nomme une base de Schauder. L’exercice fait montrer que l’espace (C0([0,1], R),∥⋅∥) admet une telle base. L’intéressant, c’est que l’on peut démontrer que tout espace de Banach (E,∥⋅∥) admettant une partie dénombrable dense se plonge isométriquement dans l’espace précédent, et donc que tout espace de Banach peut être considéré comme un sous-espace fermé d’un espace admettant une base de Schauder. Malheureusement, ceci n’implique pas que E admette une base de Schauder : il y a de (trop) nombreux contre-exemples.


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