296. On fixe un nombre premier p. On note Fp le corps Z⁄pZ, P l’ensemble des polynômes unitaires de Fp [X], H le demi-plan des nombres complexes de partie réelle strictement supérieure à 1.

a) Soit s ∈ H. Montrer que la famille (p-sdeg(F))F∈P est sommable : on note ξ(s) sa somme dans la suite de l’énoncé.

b) On note D l’ensemble des polynômes unitaires de Fp[X] sans facteur carré, autrement dit sans facteur multiple dans leur décomposition en facteurs irréductibles. Soit s ∈ H. On note ξ2 (s) = ∑

F∈Dp-sdeg(F). Montrer que ξ(2s) = -ξ(s)
ξ2(s)

c) Soit k 2 entier. Montrer qu’il y a exactement pk -pk-1 polynômes unitaires de Fp[X] de degré k et sans facteur carré.

a) Posons u = (p-sdegF)F∈P. Soit n ∈ N. Notons Pn l’ensemble des polynômes unitaires de Fp[X] de degré n : la fonction (a0,,an-1) ∈ (Fp)n↦→Xn + n∑-1

k=0akXk ∈Pn est évidemment bijective, donc Pn est fini de cardinal pn. Ainsi

∑                     (       )n
    |uF| = pnp- Re(s)n = p1-Re(s) .
F∈Pn
Or 0 p1-Re (s) < 1, donc la série géométrique ∑

n ∑

F∈Pn|uF| converge. Comme (Pn)n∈N réalise une partition de P, le théorème de sommation par paquets montre que u est sommable. On obtient en outre, toujours en sommant par paquets,
             +∞
∑  p- sdegF = ∑  pnp-sn = ---1---⋅
F∈P          n=0         1- p1-s
(1)

b) D’abord ξ2 (s) est bien définie car toute sous-famille de u est sommable. Évidemment, 2s est dans H. Développons

      ∑    -sdeg(F)       ∑   ∑   -sdeg(F) -2sdeg(G)
ξ2(s)ξ(2s) =    p       ξ(2s) =        p       p        .
      F∈D                F∈DG∈P
Sous réserve de sommabilité de v := (p-sdeg(F)p-2sdeg(G))(F,G)∈D×P, le théorème de sommation par paquets montre que
       ∑                           ∑
ξ2(s)ξ(2s) =         p-sdeg(F)p-2sdeg(G) =         p-sdeg(FG2).
    (F,G)∈D×P                    (F,G)∈D×P
Or (F, G) ∈ D × P↦→FG2 ∈P est bijective : on vérifie en effet facilement que sa bijection réciproque associe à tout polynôme A, de décomposition A =  N∏

k=1Pak
k en facteurs irréductibles, le couple formé de G := ∏N

k=1Pqk
k et F := N∏

k=1Prk
k où, pour tout k ∈ [ [1,N] ], les entiers qk et rk sont respectivement le quotient et le reste de ak modulo 2. Ainsi, par changement d’indice, la sommabilité de v découle de celle de u, et
   ∑     - sdeg(FG2)
        p          = ξ(s).
(F,G)∈D×P
On conclut à l’identité ξ2(s)ξ(2s) = ξ(s). Le calcul de la question précédente a montré que ξ(s)0, donc ξ2 (s) 0 et finalement
ξ(2s) =-ξ(s)-⋅
       ξ2(s)

c) Soit s ∈ H. En combinant le calcul final du a) avec le résultat précédent, on trouve

         (      ) +∑∞  n           +∑∞   n   +∑∞   n+1
ξ2(s)= ξ(s)-=  1- -p2s     pns = 1 + ps +   pns -   -p----
  ξ(2s)       p   n=0 p        p   n=2 p    n=0p(n+2)s
     p   +∑∞  pn - pn-1
=1 + -s +    ---ns----
     p   n=2   p
Notons an le nombre d’éléments de D de degré n. Par sommation par paquets, on a donc
       +∑∞
ξ2(s) =    anp-ns.
       n=0
En faisant parcourir ]1,+ ∞ [ par s, on en tire
    ]   -1[ +∑∞    n           +∑∞  n   n- 1 n
∀x ∈ 0,p   ,   anx  = 1+ px +   (p  - p  )x .
            n=0              n=2
Par unicité du développement en série entière (hors-programme sous cette forme mais facile à obtenir en constatant que l’égalité vaut encore en x = 0 puis en considérant les dérivées successives en 0), on en déduit en particulier an = pn - pn-1 pour tout n 2, ce qu’il fallait démontrer.


[Liste des corrigés]