[Questions-Reponses]

R827. Posé dans 124 3.

Pour tous entiers p et q tels que 0 < p < q, on pose

M (p,q) = maxx ∈R|sin (px)- sin(qx)|.

Trouver la borne inférieure de M(p,q). (Daniel Saada)

Réponse d’ric Pité

On va montrer :

|----------------------•---(----------)----------|
inf   M (p,q) = M (1,2) = 1 3 69+ 11√33- ≈ 1,76017 |
p,0<q∈pN<q------------------8--2-----------------------|
en procédant en trois étapes :
1.
On calcule de façon explicite M(1,2).
2.
Lorsque (p,q)(1,2), et q 3p on exhibe un réel yp,q tel que |sin(pyp,q) - sin(qyp,q )| > M(1,2).
3.
De façon générale, lorsque (p,q)(1,2), on montre qu’il existe un réel yp,q (sans le trouver explicitement) tel que |sin(pyp,q) - sin(qyp,q)| > M(1,2),

On aurait pu raccourcir et passer directement à l’étape 3, mais il est instructif de voir les différentes approches. Pour paraphraser Jean Dieudonné, on pourrait résumer en trois mots : majorer, minorer, approcher.

De plus, cela nous permet d’établir des résultats asymptotiques pour M(p,q).

Quelques remarques et notations

  • Pour tous entiers p et q tels que 0 < p < q, on a M(p,q) 2.
  • Si p, q sont impairs et différents modulo 4, on a M(p,q) = 2. En effet, il suffit de prendre x = π⁄2.
  • Pour tout tout entier k > 0, on a M(kp,kq) = M(p,q), on peut donc se borner au cas où p et q sont premiers entre eux.
  • On pose fp,q(x) := sin(px) - sin(qx) = 2sin(p-qx)
  2cos(p+qx)
  2.
  • Pour tout x réel, on note xla partie entière par excès définie par : x⌉- 1 < x x.

    On note {x} la partie fractionnaire de x, définie par : {x} = x -⌊x, où xest la partie entière de x.

Calcul de M(1, 2)

Soit x tel que M(1,2) = |sin(x) - sin(2x)|, alors f1,2ʹ(x) = 0. Donc x est solution de l’équation :

4 cos 2 x - cos x - 2 = 0,

dont les solutions sur [0] sont x1 = arccos( 1+√33)
  --8-- et x2 = arccos( 1-√33)
  --8--.

On a : 4f21,2(x) = (1 - 2cosx)2(4sin2x). Pour x ∈{x1,x2}, on obtient après réduction, compte tenu de 4 cos 2 x = cosx + 2 et 4sin2x = 2 - cosx,

4f21,2(x) = 34(10- 11cosx).

Sachant que cos est strictement décroissante sur [0,π],

M(1, 2) = |f1,2(x2)| = f1,2(x2) = 1
4• --------------
  3(10- 11cosx2) = 1
8• -3(------√--)
   2 69+ 11 33.

Minoration des M(1, q) pour q > 2

Lorsque q = 3 on a M(1,q) = 2.

Si q = 4 on peut utiliser la formule cos(4x) = 8cos4x - 8cos2x + 1, puis résoudre par radicaux l’équation r4 - r2 -312r + 18 = 0. Elle possède quatre solutions réelles distinctes. L’une d’entre elles ( 0.3616746) réalise le maximum de |f1,4|. L’expression par radicaux prend plusieurs lignes et on ne l’écrit pas ici. Un calcul approché fournit M(1, 4) 1, 92818.

Lorsque q > 4, on ne peut plus utiliser la méthode précédente pour calculer explicitement M(1, q) car on doit exprimer par radicaux les racines de polynômes de degré q, ce qui peut être impossible lorsque q > 4. Procédons donc à présent sans le calcul explicite de M(1, q).

Soit q > 2 un entier. Notons

xq = 4q-1-1
⌈4⌉2qπ.

On a donc q-2
2q xq
π- < q+2
-2q. Or, pour tout entier q > 4 on a

3
10 q-2
2q < q+2
2q 7-
10

Ainsi 3π
10 xq 7π
 10 . On vérifie que cette inégalité s’étend pour q = 3 et q = 4, ce qui sera utile par la suite. De plus, par construction,

sin(qxq ) = -1 et sin(3π⁄10) = sin(7π⁄10) =   √-
1+45 0.80902.

D’où

f1,q (xq ) = 1 + sinxq 1 + sin(3π⁄10) > M(1,2).

Donc M(1, q) > M(1,2), pour tout entier q > 2.

Remarque. On voit que limq+xq = π
2, donc limq+M(1,q) = 2.

Minoration des M(p, q) pour q > p > 1

Soient q > p > 1 des entiers. Si q = 2p, on a M(p,q) = M(1,2). On aimerait procéder de façon similaire en posant

yp,q = 4q-p-1
⌈4p⌉2qπ.

On a de nouveau, par construction, sin(qyp,q) = -1. De plus 3π
10 pyp,q 7π
10-, si q 3p. D’où

fp,q (yp,q ) = 1 + sin(pyp,q) > M(1,2), dans ces cas.

L’encadrement obtenu pour pyp,q vaut encore si q 2,143, mais cela ne suffit pas pour conclure.

Remarque. Si p est fixé, on a limq+pyp,q = π2, donc limq+M(p,q) = 2.

Notons g la fonction modulo 2π , définie sur R par g(x) = 2π{  }
 2xπ. Comme on l’a remarqué en introduction, on peut supposer sans perte de généralité que p et q sont premiers entre eux. Pour tout entier k naturel, on note zk = g(      )
  4k--1π
   2q. Il suffit de montrer l’existence d’un k tel que |fp,q (zk )| > M(1,2).

Or, on a de nouveau construit zk tel que sin(qzk) = -1. La suite (pzk)k∈N est périodique de période exactement q. De plus, les points (exp(ipzk))1kq se répartissent de façon équidistante sur le cercle unité.

Donc, lorsque q 5, d’après le principe des tiroirs, au moins un de ces points est sur l’arc du cercle unité

{exp () | 3π
10 θ 7π-
10},

d’où l’on tire comme ci-dessus que fp,q(zk) = 1 + sin(pzk) > M(1,2).

Il ne reste plus que deux cas particuliers à traiter.

  • Si (p, q) = (3,4) :

    On prend z2 = 7π8, ainsi f3,4(z2) = sin(  )
  5π8- + 1 1,92388 > M(1,2).

  • Si (p, q) = (2,3) :

    On prend z2 = 7π6, ainsi f3,4(z2) = sin(  )
  7π3- + 1 1,86603 > M(1,2).

On a ainsi prouvé le résultat annoncé.
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