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L’irrationalité de π2
par Laurent T’Joen
Lycée Blaise Pascal, Orsay
Résumé. On propose une preuve de l’irrationalité de π2 utilisant des arguments de Desbrow [1] et conforme au programme des classes préparatoires MP.
Abstract. Irrationality of π2
We give a proof of the irrationality of π2 using Desbrow’s arguments [1] and compliant with the MP programme.
Mots-clés : irrationalité, rationnels de Gauss, série entière.
La première preuve de l’irrationalité de π, on la doit à Lambert qui, en 1761, montre
en utilisant les fractions continues que tan(α) n’est pas un rationnel quand α Q*.
On peut noter la preuve très élégante de Niven (1947) qui ne requiert que des calculs
élémentaires. Le fait que π2 soit irrationnel a été montré par A.M. Legendre en 1794. Ces
résultats ont donné lieu à plusieurs extensions par de nombreux auteurs. En 1873, C.
Hermite a démontré la transcendance de e et, en 1882, F. Lindemann a démontré celle de
π.
L’objet de cette note est d’établir un résultat dû à Desbrow (1990), qui généralise en outre les
résultats indépendants de K. Inkeri (1960) et de T. Estermann (1966) qui montrent que α tanα est
irrationnel pour α2 Q*. On appelle rationnel de Gauss un complexe dont partie réelle et
imaginaire sont rationnelles, et on note Q[i] leur ensemble. De même, un entier de Gauss est un
complexe dont partie réelle et imaginaire sont des entiers relatifs.
Théorème 1 (Desbrow (1990)).
Il n’existe pas de nombre complexe α non nul tel chα ⁄= 0 et tel que α2 et αth(α) soient
des rationnels de Gauss.
- (i)
- π2 est irrationnel.
- (ii)
- Si α≠ 0 est un rationnel de Gauss tel chα ⁄= 0, alors th(α) (et donc exp(α)) n’est pas un rationnel de Gauss.
Le point (i) découle directement du théorème avec le choix α = iπ et le point (ii) (dû à B. Novák (1975)) est immédiat en observant que Q[i] est un sous-corps de C.
2.Démonstration du théorème de Desbrow
Pour z C et α
C*, on pose
![]() | (1) |
Pour z C , le théorème de Fubini donne
![]() | (2) |
En remarquant que f est une solution sur R de l’équation différentielle
![]() | (3) |
et en utilisant le fait que f(x + 1) = anxn pour x
R, on obtient
![]() | (4) |
De plus, pour tout x R+, f(x) = ch(α
) et comme, pour tout n
N, f(n)
(1) = n!an, on
obtient
![]() | (5) |
Par convergence normale, en utilisant (2), on trouve pour ρ > 0

Il apparaît donc que, pour tout n N,
![]() | (6) |
La définition de f (voir (1)) fournit la majoration
![+∑∞ |α|2n • ------
∀θ∈[0,2π] |f(1+ ρ2eiθ)| ≤ -----(1+ ρ2)n = ch(|α| 1+ ρ2),
n=0(2n)!](/numeros/RMS127-4/RMS127-410x.png)

![]() | (7) |
Comme an est indépendant de ρ, en choisissant ρ = n, l’inégalité (7) donne
![]() | (8) |
Dorénavant, on suppose que α2 et αth(α) sont des rationnels de Gauss.
Alors a0 = ch (α)≠0 et, en multipliant par les dénominateurs, on voit qu’il existe K N* tel que
Kα2 et Kα th (α) soient des entiers de Gauss.
On pose
![]() | (9) |
Compte-tenu de (4) et (5), on obtient
![]() | (10) |
Une récurrence immédiate montre que bn est un entier de Gauss. Par suite, on trouve par récurrence
![]() | (11) |
En effet, si bn+1 ≠ 0, alors |bn+1|≥ 1 et donc |bn+1| + |bn+2|≥ 1. Sinon, bn+1 = 0 et donc |bn+2 | = K2 |α2 bn|≠0, et donc |bn+1| + |bn+2|≥ 1.
Or, en utilisant (9) et l’inégalité (8), on constate que

Références
[1] D. Desbrow, On the irrationality of π2, Amer. Math. Monthly, 97, pp. 903-906, (1990).
[2] T. Estermann, A theorem implying the irrationality of π2, J. London Math. Soc., 41, pp. 415-416 (1966).
[3] K. Inkeri, The irrationality of π2, Nordish Mat. Tidskr., 8, pp. 11-16 (1960).
[4] I. Niven, A simple proof that π is irrational, Bull. Amer. Math. Soc., 53, pp. 509 (1947).
[5] B. Novák, A remark to a paper of J.F. Koksma, Nieuw. Arch. Wisk., 23, pp. 195-197 (1975).
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